Au début des années 1970, le Chronomaster Aviator Sea Diver (CASD) se décline sous de nouveaux modèles à la faveur du lancement de la nouvelle génération de mouvements Valjoux : la série 77XX. Pour certains, le CASD perd, à cette occasion, un peu de sa personnalité originelle. Pour d’autres, il se modernise dans les canons de la nouvelle décennie.
Si la plupart des caractéristiques fondamentales restent réunies (carrure à chanfreins, lunette mobile à double graduation, compteur type « régate »), les dimensions évoluent quelque peu. Le diamètre hors couronne passe de 38,5 à 38,2 mm, l’épaisseur augmente de 13,5 à 14,1 mm, tandis que l’entre-cornes passe de 20 à 19 mm. L’ouverture de cadran, enfin, passe de 30,5 à 31,2 mm. Des détails, pensez-vous… sauf que ces petites rectifications de cotes ne sont pas anodines dans la perception générale de l’engin. Le CASD s’éloigne un brin des proportions magiques qui faisaient sa personnalité. Ces versions restent pour autant de très jolis chronographes sportifs, tout à fait de leur temps. Disons qu’ils rentrent un peu dans le rang. Plus sages que les 10 ATM type Rotary Aquaplunge (ci-dessous, à gauche), atteignent-ils la qualité esthétique des Yema « Daytona » (ci-dessous, à droite) de la même époque ?
Valjoux 7733
Ainsi trouve-t-on, sous les marques Croton et Nivada et sous d’autres appellations plus exotiques, des chronographes animés par le calibre 7733, successeur du Valjoux 92. Ces versions, pour la plupart, se caractérisent par la présence d’un rehaut sur lequel est imprimée l’échelle tachymétrique. Cet assemblage permet de proposer plus facilement des combinaisons de couleurs variées.

Cette version « de base » existe aussi avec un cadran à fond noir, compteurs blancs sur lequel le décompte type « yachting » n’est plus matérialisé par un quartier rouge sur les cinq premières minutes mais par une alternance de carrés rouge et bleus :

Voici quelques versions trouvées à droite à gauche, sans prétendre à l’exhaustivité :
Deux versions exotiques et rares : l’une avec un cadran marron glacé, l’autre avec le cadran clair, avec les sympathiques repères bicolores sur le totalisateur des minutes.

On trouve, dans le même boîtier, des chronographes équipés du même calibre Valjoux 7733 sous d’autres marques. Certains portent même l’appellation Chronomaster Aviator Sea Diver, comme les modèles ci-dessous — Le Marc 100, Pierre Vallée et Sussex — dont la conception est en tout point identique, au décor du cadran près.
D’autres modèles, encore très proches, s’affranchissent de l’appellation Chronomaster. Ils ont en commun le boîtier et la lunette (moyennant des variations de typographie), ainsi que le cadran et son superbe compteur « Trivial Poursuit » pour les départs de régate. On observe en revanche, nonobstant la présence de la « lollipop », des variations dans les aiguilles minutes-secondes.
Valjoux 7736
Si la carrière du CASD commence à s’éteindre en Europe, elle se poursuit aux États-Unis, sous la marque Croton. C’est ainsi que l’on trouve, dans le même boîtier que la version tournant avec un Valjoux 7733, une déclinaison à trois compteurs équipée du Valjoux 7736, lui-même successeur du Valjoux 72.

Là encore, on trouve des modèles très similaires sous des marques diverses, telles que Austin ou Difor :
Valjoux 7765
Ultime version du CASD, datée de 1977, ce modèle est équipé du calibre Valjoux 7765, caractérisé par le positionnement inhabituel des compteurs et la date à trois heures. Il ne suffira pas à sauver la marque Nivada, qui sombre au début des années 1980 pour renaître bien plus tard en Asie avec des modèles d’un intérêt beaucoup plus limité.
Skymaster Valjoux 72
Alors que nous évoquions le Rolex Daytona à la fin de notre chapitre sur les CASD à Valjoux 23, achevons ce chapitre avec une des variantes les plus rares de la famille des Chronomaster : le Croton Skymaster. Ce chronographe à trois compteurs est animé par le prestigieux Valjoux 72 et certaines de ses versions reprennent le boîtier Chronomaster.
Conclusion
Ainsi s’achève cette série d’articles sur la grande saga des Chronomaster Aviator Sea Diver. Une saga débutée en 1961, qui aura duré dix-sept ans. Une longévité dont très peu de modèles peuvent se prévaloir, signe d’un produit bien né et judicieusement adapté, en fonction de l’évolution des clients et des fournisseurs, dans une période traversée par la concurrence exacerbée, l’apparition des mouvements à quartz et le premier choc pétrolier.
Si le CASD achève sa carrière commerciale dans la confidentialité et reste ensuite longtemps l’objet d’une relative indifférence, il suscite, depuis quelques années, un regain d’intérêt. Un retour en gloire qui promet de durer, notamment grâce à l’ouvrage de référence réalisé par Grégoire Rossier et Anthony Marquié, Chronomaster Only, qui sera disponible dans quelques semaines à peine. À défaut de rivaliser avec le travail encyclopédique des deux auteurs, puisse ce dernier article, entamé fin 2017, contribuer au moins à mettre en appétit les passionnés !
Remarque au lecteur
Cet article, comme les précédents de cette série, résultent de modestes recherches empiriques et ne prétend ni à l’exhaustivité ni à la certitude. La difficulté à obtenir des informations sur ces modèles — la marque Nivada ayant disparu sans laisser d’archives connues — invite à la prudence… mais aussi à la poursuite de l’exploration…
Depuis sa publication, deux auteurs ont publié un ouvrage qui fait le tour de la question de manière définitive ou presque :
Références
- Mentawatches.com. [en] Un exemplaire du Croton Skymaster, cal. Valjoux 72.
- Crédits photos : TitusChrono (Croton NOS), Weston Cutter / Chronotrader, Guillaume @Watchyourfood / Instagram, Radiumstash.com, Hodinkee, SpaceCowBoy/ Thedivewatchconnection.com, The Watch Spot Blog, Local Time, Vintage Watch Collective, Luxuwrist/Rolexforums.com, Brown-snout.com.
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