Promise pour le printemps mais livrée en juillet, cette « montre qui venait du froid » a attendu l’arrivée des chaleurs accablantes de l’été pour se présenter au courrier et, Malheureusement, elle ne laisse pas de glace…
À la prise en main de cette nouvelle ZRC Grands-Fonds 300 m North Adventure, la première surprise est celle du volume et du poids de la bête. Pour un habitué aux mensurations de la Grands-Fonds d’origine, c’est un choc…

Si son diamètre n’est en rien hors normes aujourd’hui (40,5 mm), la grande ouverture de cadran et la longueur de plus de 49 mm de corne à corne en font un objet particulièrement imposant sur un poignet fluet, même s’il l’épouse plutôt bien grâce aux anses articulées, lesquelles assurent une liaison avec le bracelet aussi solide matériellement que visuellement.
LHC : 40,40 mm. LCC : so. LHT : 49,20 mm. EC : 24 mm. EHT : 15,30 mm.
Le poids, quant à lui, tient à la quantité d’acier (du classique 316L, amagnétique) que contiennent à la fois le boîtier et le bracelet (on en reparlera) mais aussi à l’épaisseur du verre saphir bombé (4 mm). Total : environ 190 g au poignet et une sensation qui conforte la qualité perçue.
Farandole de détails
Passé cette première impression, il est temps de faire lentement le tour du propriétaire, toujours avec les yeux de celui qui n’a connu que des ZRC d’il y a cinquante ans…
La première grande satisfaction est que l’on retrouve totalement l’ADN de la marque dans le design de cette Grands-Fonds du XXIe siècle. S’il a pris de l’embonpoint, le boîtier a conservé la forme hexagonale caractéristique des Grands-Fonds type II ou III et, à peu de choses près, tous ces angles qui la rendent unique sont bien présents, à commencer par l’arrête qui, au centre de chaque flanc, casse la ligne de profil et rend la montre légèrement brutale. Seule évolution significative : la précision de l’usinage et la finesse du brossage. Avec une GF ancienne, on a l’impression que le bloc d’acier est taillé au silex ; la nouvelle paraît, pour sa part, ciselée au laser.
La lunette à 60 crans suit les mêmes critères stylistiques en reprenant le principe d’un insert noir dans lequel sont inclus des points lumineux. Certes, les trois points à 12 heures sont étrangement « encadrés » d’un filet de métal dont la justification ne paraît pas évidente a priori mais on s’y habitue très vite.
Un cadran exclusif
Comme la lunette à points, le cadran des nouvelles Grands-Fonds s’inspire largement du dessin des type II : index pointus, gros chiffres à la typographie caractéristique à chaque quart d’heure, petits points lumineux proches du centre. L’ensemble est équilibré et parfaitement lisible.
La North Adventure étant une montre événementielle, une série spéciale conçue à l’occasion de l’extraordinaire expédition menée en solitaire par Alban Michon en Arctique, elle présente aussi des caractéristiques particulières : le cadran salue l’événement avec le logo de l’expédition — un ours blanc stylisé — et la mention NORTH ADVENTURE.

Cette version présente deux autres particularités : d’abord, le logo ZRC, qui abandonne tristement le triangle inversé au seul profit de la petite couronne que la société a retenu comme emblème, comme sur la 1964 Spirit ; ensuite, la présence de la date à trois heures, comme sur la Sport Chic, mais blanche sur fond noir et surtout magnifiée par une loupe circulaire du meilleur effet.
Les aiguilles, enfin, reprennent les formes des Grands-Fonds d’origine : magnum et lollipop. Là encore, la lisibilité ne peut être mise en défaut, d’autant qu’elles ont été légèrement élargies pour cette version.
ECS et CPS : de nouveaux noms « technologiques »
pour les astuces géniales des concepteurs originels
Ah, le marketing… Entre autres caractéristiques, ZRC met en avant dans son argumentaire deux acronymes qui fleurent bon la technologie de pointe mais qui sont, en réalité, la reformulation d’inventions tout à fait astucieuses… qui datent des années 1960 !
La première est l’ECS (pour Easy Clean System). Ce dispositif breveté (n°1462496) sert au nettoyage de l’intérieur de la lunette crantée. En effet, la rotation de celle-ci peut se trouver entravée, à la longue, par le dépôt de poussières et de sel cristallisé. Concrètement, un discret petit canal permet de faire circuler de l’eau claire afin, lors du rinçage de la montre, d’éliminer ces particules indésirables. Les fidèles lecteurs de ce site se souviennent cependant que ce dispositif dérive directement d’une astuce très pragmatique, relatée par Claude Tauveron et trouvée par Yves Pastre, alors horloger de la Marine à Toulon. Une « histoire de trou » à retrouver dans notre article consacré aux ZRC Grands-Fonds d’origine.
L’autre caractéristique, baptisée CPS (pour Crown Protection System), n’est autre que le génial système d’anse inventé dès le début des années 1960 par les concepteurs de la ZRC type II et empêchant, tout comme sur les Triton Spirotechnique, de porter la montre sans que la couronne soit parfaitement vissée et, a fortiori, de dévisser cette dernière sans retirer la montre du poignet. Pas besoin, comme sur certaines Panerai, de surcharger la montre et gêner le poignet avec une protection de couronne latérale : la fixation du bracelet remplit cette fonction de manière infaillible et la couronne à 6 heures ne gêne pas les mouvements du poignet.
Une couronne XL
D’ailleurs, puisque nous parlons de couronne, attardons-nous sur celle de la North Adventure : déjà massive sur les autres versions, elle a été encore agrandie sur cette série spéciale pour la rendre plus facile à manipuler avec des gants épais sous le blizzard arctique… Je peux vous dire que ce n’est pas du luxe : l’accessibilité de la couronne n’était pas le point fort de la Grands-Fonds d’origine et le défaut s’est, je trouve, accentué avec la nouvelle. En cause : l’épaisseur de l’anse, qui n’a plus rien d’une fine lame de métal (D’ailleurs, on ne la retire plus en la tordant comme à l’époque mais en dévissant une pompe à l’aide d’un petit tournevis dédié.)…
Même en version XL, cette couronne nécessite des doigts de fée et je doute un peu qu’elle soit réellement manipulable avec des gants fourrés, même en se souvenant qu’elle se visse dans le sens contra-horaire. (Je promets de tenter l’expérience quand viendra le moment de remonter les affaires de ski de la cave…)
Le bracelet : une pièce d’orfèvrerie
Contribuant fortement à alourdir la montre, le bracelet reprend les éléments fondamentaux des modèles originellement montés sur les Grands-Fonds des années 1960. D’abord, l’alternance de petits maillons étroits et de grands maillons évidés et la présence de deux maillons comportant une lame de métal retenue par un ressort permettant de conférer un peu d’élasticité au bracelet. Ensuite, la boucle, cette boucle mystérieuse pour les non-initiés, infernale pour ses utilisateurs mais tellement sécurisante pour un plongeur. Désormais signée, la pièce pivotante fonctionne bien exactement comme son aînée.
Nous saluerons donc ici la fidélité aux principes d’origine, le gain en robustesse en phase avec l’évolution de la carrure, conférant une parfaite homogénéité de l’ensemble. Seul bémol : le choix discutable d’avoir fait polir les petits maillons de jonction et la boucle pivotante plutôt que d’avoir appliqué un brossage général. Rien de majeur, en somme.
Très attachante au fond
Le fond lui-même mérite un petit détour. Superbement usiné, il s’ouvre au moyen d’une clef spécifique qui vient s’emboîter dans les quatre encoches triangulaires. Sa forme particulière, creusée au centre, lui permet de rester bien en place au poignet par effet « ventouse ».
Le pourtour porte les mentions GRANDS FONDS 300 METERS SWISS MADE SINCE 1904 et, au centre :
4000 E2
numéro de série
logo ZRC avec la petite couronne
LIMITED EDITION
XXX/320.
Mécanique
Il va sans dire que je n’ai aucun moyen d’ouvrir mon exemplaire (garanti étanche à 300 mètres) et que je dois piquer une photo officielle pour vous montrer le cœur battant de la Grands-Fonds : un calibre ETA 2824-2 (11,5 lignes, 25 rubis, 28800 A/h, 38 heures de réserve de marche), évolution très répandue et reconnue du calibre 2824 apparu en 1972, et ici en version Élaboré, c’est-à-dire un cran au-dessus de la finition Standard.
Conclusion
Voici quelques jours, j’ironisais ici-même sur les péripéties qui ont entouré l’assemblage et le routage de cette ZRC North Adventure, allant jusqu’à suggérer que l’expédition d’Alban Michon allait finir par sembler plus facile que celle de la montre qui l’avait accompagné… La bête a fini par se poser et valait bien l’attente : une intelligence de conception dans le prolongement du travail des aînés, une qualité de fabrication incontestable, une personnalité inimitable… Mais à ces qualités, communes à toutes les nouvelles ZRC Grands-Fonds, s’ajoute un petit plus : justement la part de rêve attachée à l’aventure d’Alban Michon à travers l’Arctique. Un rêve qui continue, d’ailleurs, car l’insatiable explorateur vient d’annoncer qu’il repartait déjà au Spitzberg. Nul doute que sa ZRC l’accompagnera dans les eaux glacées où il s’apprête à retrouver ses compagnons de baignade préférés, les ours polaires… En ce qui me concerne, le continuerai donc à rêver mais la mienne restera au chaud !
Références
- Zrc1904-northadventure.com. [fr] Page dédiée à la ZRC Grands-Fonds 300 m North Adventure.
- ZRC North Adventure Owners and Sponsors. Page Facebook toujours très animée de la communauté des souscripteurs et propriétaires de cette ZRC.
- Le ZRC Watch Club. Impossible de ne pas vous inciter à visiter également le club ZRC sur Facebook, qui est une mine d’informations, un réservoir de bonne humeur et un puissant générateur de fractures oculaires…
- Manuel de référence. [pdf] [fr/en] Manuel officiel de la ZRC Grands-Fonds 300 m North Adventure.
- Albanmichon.com. Site officiel de l’explorateur Alban Michon, promoteur de la marque ZRC et co-concepteur de la Grands-Fonds North Adventure. Il a aussi une page Facebook.
- Crédits photos : Fred Chrono/Chronographes.net, ZRC Watches.
3 commentaires sur « ZRC Grands-Fonds 300 m North Adventure »