L’annonce, fin 2021, d’une réédition des ZRC Grands-Fonds a été une divine surprise pour les afcionados de la marque. Double surprise, même, puisque deux versions de la GF 38 ont été lancées, reprenant assez fidèlement les styles respectifs des série 2 et série 3 des années 1960. Alors que, deux mois après la livraison des premiers exemplaires, une troisième version vient tout juste d’être révélée, si nou sen profitions pour procéder à une petite revue de la « série 3 » ?
Depuis que ZRC s’est relancé sur le marché des montres de plongée avec la Grands-Fonds 300, il existait une sorte de frustration, de la part des collectionneurs. Frustration ou plutôt attente : malgré les grandes qualités dont peuvent se prévaloir les ZRC contemporaines, le rêve de voir réédités les modèles iconiques des années 1960 ne s’est jamais éteint. Des montres légères et simples, aux dimensions contenues, à la robustesse éprouvée, au design à nul autre pareil et à l’histoire militaire attestée.
Alors, quand Georges Brunet fit officiellement savoir, le 28 octobre 2021, que le rêve deviendrait réalité, ce fut une divine surprise pour les fans, et d’autant plus divine que non pas une mais deux rééditions étaient annoncées et révélées : une « Série 2 » sans date et une « Série 3 » avec date. Un an plus tard, les premiers exemplaires des réf. GF 38163 et GF 38263 arrivaient dans les foyers et désormais, c’est la réf. GF 38293 qui pointe le bout coloré de sa trotteuse avec un cadran bleu, des pointes de rouge et un insert de lunette inspiré de la ZRC Spatiale. Révélée aujourd’hui-même, elle est en précommande chez les revendeurs de la marque1 et sa livraison est promise pour mars prochain.

Heureux propriétaire de ZRC vintage, j’ai pu me permettre de résister à la tentation d’acquérir l’une de ces nouvelles bestioles mais un collègue de bureau a eu le très bon goût de se porter acquéreur d’une GF 38 date et m’a fait assez confiance pour me la confier le temps d’une prise en main et de quelques photos. Inutile de préciser que je ne me suis pas fait prier !
Déballage
D’emblée, la taille et l’aspect de la boîte instaurent une différence par rapport aux gros coffrets qui abritent les Grands-Fonds 300. ZRC a adopté un parti-pris de simplicité, comme un écho de la vocation de montre-outil de la Grands-Fonds d’origine, qui ne s’embarrassait pas d’excès d’atours. Autre clin d’œil sympathique aux nostalgiques, la carte de garantie reprend les codes graphiques de celle des années 1960.


Ouverte, la boîte dévoile un engin qui ne laisse pas un instant place au doute. Ou plutôt si : un instant tout de même, on se croit bien face à une Grands-Fonds d’origine à l’état neuf. Très vite, les finitions plus modernes, l’aspect et la couleur du Luminova, la forme de la couronne et les proportions générales dissipent tout de même l’illusion… Réédition ne veut pas dire copie conforme et, quelque-part, tant mieux.




Tour de boîte
La plus notable infidélité au dessin d’origine — par ailleurs très bien respecté — est l’augmentation du diamètre : si les Grands-Fonds séries 2 et 3 affichaient un « petit » 36 mm de diamètre, leurs réinterprétations culminent à… 39 mm.

DIMENSIONS
LHC : 39 mm (38,1 mm à la lunette).
LCC : 39 mm.
LHT : 46 mm.
LEC : 22 mm.
EHT : 13,75 mm.
À ce stade, les plus attentifs doivent froncer les sourcils en se demandant s’il n’y a pas une coquille dans cet article, la « GF 38 » ne s’appelant pas ainsi pour rien. L’erreur ne vient pas pourtant de l’article et remonte même à la conception de la montre : imaginée initialement pour un diamètre de 38 mm, elle a pris tout de suite cette appellation mais les dimensions ont évolué au cours de la période de développement et quand un membre de l’équipe réalisa soudain que le nom ne collait plus, il fut décidé de maintenir « GF 38 ».



La comparaison du premier prototype et de la version définitive révèle aussi que les évolutions ont plutôt contribué à rapprocher le projet du dessin d’origine. Si c’est évident pour l’insert de lunette (voir ci-dessus), c’est aussi notable pour certains aspects du cadran — guichet de date souligné d’un filet blanc, taille des points lumineux. Pour le reste, on notera un allongement des cornes et une couronne plus proéminente que celle de sa grand-mère.


Comme de tradition chez ZRC, cette dernière a bien toujours ce pas-de-vis inversé qui déroute les néophytes mais contribuait, à l’origine, à éviter des erreurs de manipulation dont la conséquence — compromission de l’étanchéité de la montre — pouvait être fatale… Elle est désormais signée du symbole de la marque et perd donc l’encoche dont les Séries 3 étaient pourvues afin de faciliter, si besoin, le serrage et le desserrage à l’aide d’un tournevis.
Au verso, le fond reprend aussi l’esprit de la montre d’origine avec quatre longues encoches de serrage et des inscriptions disposées de manière similaire.

On pourra ici regretter le manque de précision de la gravure et des arrêtes un peu molles qui, en termes de finition, ne sont pas dramatiques mais pas non plus du meilleur effet.
Bémol sur bracelet
Naturellement, il était impensable de proposer une réédition de la Grands-Fonds 300 m sans l’assortir du fameux bracelet acier. Là encore, tout y est, des lames à ressorts assurant l’élasticité du bracelet jusqu’à la boucle à sécurité pivotante, toujours aussi malaisée à manipuler mais toujours inviolable une fois en place… Même les gravures sont similaires. On se réjouit aussi de voir adopté le système de pompes vissées qui permet de facilement retirer le bracelet.




Pour autant, sa qualité perçue constitue, selon moi, le (seul) vrai défaut de cette GF 38. S’il a le mérite d’être léger et facilement réglable (les maillons intermédiaires peuvent être retirés moyennant une petite manipulation guère compliquée, le brossage est un brin approximatif et il émet un cliquetis très cheap qu’on pardonnerait aisément à une montre vendue quelques centaines d’euros mais que je trouve impardonnable pour un modèle présenté à plus de 3000 euros.
En attendant que ZRC réagisse et propose — espère-t-on — une V2 de ce bracelet acier digne d’une montre par ailleurs réussie, un « kit Nato » (bracelet nylon et pièce de bout ad hoc) devrait être proposé prochainement. Une adaptation dans le style des « perlons » utilisés à l’origine sur les Séries 3 en dotation à la Marine nationale serait une idée sympa mais ne semble pas que cette option ait été considérée. Cet accessoire permettra au moins de varier les usages et le rendu au poignet d’une montre qui s’y trouve déjà particulièrement bien.
Au poignet


Entre les mains et au poignet, la GF 38 convainc en effet immédiatement : les dimensions plus généreuses sont parfaites pour un poignet fluet ou moyen et rendent la Grands-Fonds tout à fait actuelle sans la dénaturer. Détail plus important qu’il en a l’air, le verre a une épaisseur et une courbure parfaites, qui restitue bien les sensations offertes par les anciens verres Aquatic… Une fois le bracelet réglé — parfois au prix de la suppression des longues pièces ajourées intermédiaires quand celle des maillons ne suffit pas, sa légèreté et son élasticité font des merveilles : la montre se pose bien confortablement et ses dimensions raisonnables la rendent extrêmement polyvalente. Du costume à la combinaison de plongée (elle est étanche à 300 m), la GF 38 sera à l’aise partout.
Conclusion
Largement fidèle aux versions d’origine, dotée de toutes les qualités techniques d’une montre de plongée contemporaine, la GF 38 est une option très valable pour quiconque recherche un garde-temps héritier de modèles mythiques et bien plus originale — à budget comparable — qu’une Tudor Black Bay… La froideur relative de son cadran et un bracelet trop fluet pour une montre d’aujourd’hui tempèrent l’appréciation mais ces défauts ne sont pas rédhibitoires : le premier relève d’une pure affaire de goût personnel et on peut espérer, pour ceux que cela rebute, que le second sera corrigé dans la prochaine version. Cette montre le mérite incontestablement. Restera à espérer, pour certains, que ZRC décline ces modèles avec un Luminova plus « chaud » que le pâle verdâtre retenu ici, et pourquoi pas aussi des versions mimant les cadrans tropicalisés, à la manière de la splendide 1964 Spirit ? Ne restera plus alors aux fans de la marque qu’à attendre que ZRC décide de se lance dans une réédition ou une réinterprétation de la Série 1…



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1. La liste des revendeurs ZRC est disponible ici et s’il fallait en recommander un, ce serait assez naturellement la Bijouterie Clouzeau à Pithiviers, tenue par un authentique passionné de la marque.
Références
- Forum à montres [fr]. Un fil de discussion à propos de la ZRC GF 38.
2 commentaires sur « ZRC Héritage GF 38 : deux Grands-Fonds peuvent en cacher une autre »