C’est sans doute la plus sous-évaluée des Dirty Dozen, ces montres commandées par l’armée britannique à la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’Eterna W.W.W. est rare, élégante, dotée d’un superbe mouvement, le tout provenant d’une manufacture prestigieuse. Qu’attendent les collectionneurs pour lui rendre justice ?
Vous le savez sans doute déjà mais mieux vaut se répéter que se contredire : les Dirty Dozen forment une grande famille de montres militaires autrement désignées par trois W.W.W. qui veulent dire Wrist Watch Waterproof. Destinées aux troupes britanniques engagées dans la Seconde Guerre mondiale, elles ne sont livrées qu’en 1945, après la défaite de l’Allemagne nazie, mais connaissent par la suite d’autres théâtres d’opérations, jusqu’à, pour certaines d’entre elles, la première guerre du Golfe…
Parmi les Douze, l’Eterna est l’une des plus rares. Avec seulement 5 000 exemplaires produits, elle fait jeu égal avec la Longines, derrière la Grana (1 000 à 1 500 unités) et l’IWC (6 000).
Boîtier
C’est l’une des plus rares mais aussi souvent l’une des mieux conservées grâce, notamment, à son boîtier en acier, plus résistant aux altérations que les boîtiers en alliage chromé de certaines de ses collègues. Celui-ci, d’un diamètre de 36 mm, se distingue par un profil un peu plus « tendu » que la plupart des autres W.W.W., dont les cornes semblent agripper le poignet comme les serres d’un rapace. Cette forme particulière, plus en accord avec les canons des années 1950-1960, lui confère aussi un petit surcroît de modernité.
Autre élément caractéristique : une lunette concave qui allège visuellement la carrure avec une indéniable élégance.

LHC : 36 mm. LCC : nd. LHT : 45 mm. EC : 18 mm. EHT : 11,5 mm.
Côté face, le fond en acier est vissé et porte les marquages de rigueur :
- la Broad Arrow signalant l’appartenance à l’armée britannique,
- les trois initiales W.W.W.,
- le numéro de série militaire, à quatre chiffres, précédé de la lettre P
- le numéro de série civil, à sept chiffres.
À chacune des douze marques est associée une ou deux lettres destinées à faciliter le référencement des modèles dans les registres de l’armée. Eterna s’est vu attribuer les lettres P et Q (mais le P est également dévolu aux Cyma).
Mécanique
Pour accéder à la mécanique, il faut donc dévisser le fond et retirer le cache-poussière en fer doux. Ce dernier permet notamment d’isoler plus efficacement le mouvement des effets des champs magnétiques. On découvre alors que notre Eterna abrite un splendide mouvement maison : le calibre 520 (15 rubis), qui oscille à 18 000 A/h et affiche une réserve de marche de 42 heures.
Réputé fiable et précis, celui-ci se retrouve dans un certain nombre d’Eterna civiles. C’est aussi un dérivé de ce mouvement, le 520S, à seconde centrale, qui animera bien des modèles de la marque pendant de longues années.
De la Dirty Dozen à la Kon-Tiki…
Dernière chose à noter à propos de ce modèle : certains émettent l’hypothèse que le choix d’Eterna par l’explorateur norvégien Thor Heyerdahl pour la fameuse expédition du Kon-Tiki dans l’océan Pacifique, en 1947, aurait été motivé par la réputation de la marque dans la fabrication de montres résistantes à l’eau, et que cette réputation aurait été notamment forgée par son modèle type W.W.W.
Il est vrai, en tout cas, que la plupart des marques ayant été fournisseurs des armées victorieuses durant la Seconde Guerre mondiale se sont appuyées sur cette forme de « reconnaissance » pour la transformer en argument commercial… et Eterna ne s’est vraisemblablement pas privé de le faire. Quand on sait le succès et la postérité qu’auront ensuite l’appellation Kon-Tiki dans l’histoire de la marque Eterna (jusqu’à aujourd’hui), il est plaisant de croire qu’il y a, à l’origine, la jolie montre militaire qui vous a été présentée ici…

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