Dans la grande famille des chronographes de poignet, certains se distinguent par un parti pris fonctionnel en vertu duquel les totalisateurs — les compteurs si vous préférez — doivent être surdimensionnés, ce afin de rendre d’autant plus lisibles les informations qu’ils contiennent. On les appelle les Big eyes. Esthétiquement, le résultat est plus que séduisant.
Premiers exemples chez Universal Genève
L’adoption de compteurs surdimensionnés est observée dès les années 1930-1940, en particulier chez Universal Genève. Les modèles Compax et apparentés se caractérisent en effet par des cadrans particulièrement épurés, composés généralement d’index et de chiffres signalant les heures, d’une discrète échelle tachymétrique sur le pourtour et, donc, de grands totalisateurs très lisibles.
L’enjeu est bien, en effet, la lisibilité des informations et, sur un cadran d’à peine 30 mm, il est donc impératif de faire des choix. Si la vocation sportive ou technique de la montre (mesurer des temps courts ou des durées plus longues avec plus ou moins de précision) l’emporte sur son usage courant (donner l’heure), la hiérarchisation des informations affichées doit s’adapter.
Le modèle Uni-Compax ci-dessous illustre bien la problématique, sachant que le boîtier a un diamètre de 34,5 mm hors couronne :
Une spécialité Heuer-Leonidas
Universal Genève n’est, bien entendu, pas la seule maison horlogère à adopter de manière régulière ce type de design. On trouve en effet des choix similaires chez Heuer et Leonidas — deux marques qui ont d’ailleurs tissé des liens au point de fusionner en 1964…
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Ainsi, des chronographes des années 1940 jusqu’au début des années 1960, les grands compteurs sont restés l’apanage de toute une série de modèles de la maison Heuer et l’introduction de cadrans contrastés (fond noir et registres blancs) ne fit que renforcer l’impact visuel, pour le plus grand bonheur des amateurs (voir les toutes premières Heuer Autavia 3646 et nos sujets sur l’Autavia Cup, en 2016).
En voici deux exemples : une Heuer Baylor à deux compteurs et une Heuer produite pour la marque américaine Abercrombie & Fitch sous la référence 2444, à trois compteurs.
Heuer-Baylor, cal. Valjoux 23.
Abercrombie & Fitch, réf. 2444, cal. Valjoux 72
La référence 2444, affectionnée des collectionneurs, se distingue non seulement par ses trois grands compteurs, mais aussi par la disposition radiale des chiffres à l’intérieur de ceux-là. Pas évident de reconnaître la présence du calibre Valjoux 72 dans ce boîtier de 36 mm ? Sa présence est trahie par la position des petits poussoirs, qui ne sont pas situés à même distance de la couronne.
Chez Leonidas, on trouve également un grand nombre de modèles Big eyes, au point que cela en devienne presque la marque de fabrique de ce spécialiste des chronographes.
Leonidas style militaire, cal. Venus 188
Malgré un boîtier plus généreux en diamètre (36 mm hors couronne), ce chronographe de style militaire conserve le principe de compteurs surdimensionnés. Combinés avec de gros chiffres lumineux, ils révèlent sans ambiguïté les fonctions prioritaires de l’engin : donner l’heure et permettre de suivre les séquences prévues au plan de vol.
Leonidas pour Hyde Park
Leonidas a produit quelques montres sous licence. Ainsi en est-il de ce chronographe réalisé pour Hyde Park, horloger américain. On y retrouve le même design de cadran que pour le chronographe à cadran noir, avec un résultat tout aussi convaincant au plan esthétique…
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Eterna, cal. Valjoux 71
Pour terminer cette petite revue thématique, voici un autre chronographe à trois compteurs, cette fois-ci de marque Eterna. La présence des trois grands compteurs y semble moins spectaculaire ; la raison vient du diamètre de la montre (37,5 mm) et le choix du rare calibre Valjoux 71. Ce dernier offre en effet des dimensions plus généreuses que son très proche cousin Valjoux 72.
Des Big eyes aux Big eye
Vint un jour où la soigneuse symétrie latérale cessa d’être incontournable, donnant aux Big eyes un caractère plus « singulier ». Le premier chronographe à adopter cette configuration semble être l’Aquastar Deepstar, dont le gros œil a longtemps rebuté certains collectionneurs, avant de les fasciner…
Ces chronographes Big eye sont tout particulièrement destinés aux amateurs de nautisme, le totalisateur de minutes étant conçu pour mettre en valeur le décompte des deux fois cinq minutes précédant le départ des régates, comme sur cette Dugena et cette Yema Yachtingraf :
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Conclusion
Elle sera simple : maintenant que vous êtes convaincus par la prestance des chronographes « big eyes », ouvrez bien les vôtres ! Si certains d’entre eux sont encore abordables (quelques centaines d’euros peuvent suffire), ils sont rares et ne restent pas longtemps disponibles…
Références
- Crédits photos : Lucchese/WatchUSeek (Aquastar Deepstar), Fred Chrono/Chronographes.net.
2 commentaires sur « « Big eyes » : quand les chronos font les gros yeux »