Nivada Aquamatic Super-Antarctic

Une marque horlogère opportunément associée à une expédition au bout du monde, une montre rarissime et au goût d’aventure : voici l’Aquamatic Super-Antarctic.

Nous sommes en 1955 : l’US Navy lance une importante expédition dans le cadre de la campagne internationale d’exploration du pôle Sud. L’opération connaît un retentissement mondial car l’Antarctique est encore, à cette date, l’une des dernières terres inconnues du globe. Vouée à se dérouler dans des conditions extrêmes, elle érige ses participants au rang de derniers explorateurs de la surface de notre planète avant de prochaines conquêtes qui se situeront dorénavant dans les profondeurs terrestres et océaniques, le cosmos et, plus tard, dans des espaces bien plus virtuels… L’expédition, qui prend le nom de Deep Freeze I, est largement médiatisée et passionne le public.

C’est aussi un événement majeur dans l’histoire de Nivada. La marque réussit en effet à se rendre partenaire de l’expédition : conçue dans la perspective de l’Année géophysique internationale (1958), une montre automatique étanche, baptisée Antarctic, équipe en effet les membres de l’expédition et bénéficie de son grand retentissement.


Le succès est tel que Nivada décline le label Antarctic sur des quantités de modèles pendant une bonne dizaine d’années avec pour principe commun de proposer des montres adaptées à des conditions réputées difficiles : températures extrêmes, résistance à l’eau et aux champs magnétiques.


Rolex Explorer by Nivada ?

Parmi elles, l’une des plus rares et convoitées est le modèle Aquamatic Super-Antarctic. Malgré son diamètre modeste au regard des normes actuelles (34,3 mm hors couronne), l’engin impose sa personnalité au poignet grâce à un magnifique cadran laqué rehaussé d’un chemin de fer (chapter ring) et d’index et aiguilles lumineux.

Dimensions

LHC : 34,4 mm.
LHT : 40,5 mm.
LEC : 18 mm.
EHT : 11,1 mm.

Dépourvu de numérotation, le cadran est décoré de simples et efficaces index géométriques : triangles pointés vers le centre à 3, 6, 9 et 12 heures, bâtons aux heures intermédiaires. Les écritures sont, quant à elles, sobres et peu nombreuses : le logo Nivada apparaît à 12 heures dans la typographie introduite dans les années 1960 et que l’on voit apparaître sur les Chronomaster Aviator Sea Diver à calibre Valjoux 23, suivi de l’appellation AQUAMATIC. À 6 heures, Super Antarctic (avec ou sans trait d’union selon les versions) est inscrit en cursives, assorti de la mention 21 RUBIS. Tout en bas, le SWISS MADE indique que la matière lumineuse est a priori du radium.

On trouve ainsi sur cette montre des codes présents sur les premières Rolex Explorer (1953) et Submariner (1954) ou encore sur la Zénith S.58 (1958). La Super-Antarctic partage en effet avec elles — le prestige en moins — la vocation d’accomplir sa mission avec fiabilité dans toutes les circonstances avec un incontestable supplément d’élégance, En d’autres termes, elle s’inscrit parfaitement dans la veine des premières montres-outils typées pour les grandes aventures et la plongée qui séduiront d’abord les professionnels et les « gentlemen extraordinaires » avant de conquérir le grand public et, bien plus tard, des collectionneurs plus casaniers !

Une décennie d’exploits

En 1953, Edmund Hillary et Tensing Norgay parviennent, les premiers, au sommet de l’Everest, une Rolex Explorer au poignet. Un an plus tard, c’est une Vulcain qui participe à l’ascension du K2. En 1956, Enicar participe à la victoire sur le Lhotse. Quant à l’Année géophysique internationale, elle permet à d’autres marques de tirer parti des événements : hormis Nivada et Zénith, déjà cités, on peut aussi évoquer Jaeger-LeCoultre. Son magnifique chronomètre Geophysic participe, à bord du sous-marin nucléaire USS Nautilus, à une mission sous le pôle Nord en 1958.


Dans ses entrailles, l’Aquamatic abrite un calibre A. Schild 1580, mouvement automatique sans date lancé en 1958, que l’on rencontre sur quelques modèles de la fin des années 1950 (Jeanrichard, Richard, Heuer Baylor, Rodania). Baptisé Maximatic, ce mouvement est équipé d’un dispositif permettant à la masse oscillante de remonter le mécanisme dans les deux sens de rotation, comme sur le FELSA Bidynator.

Au sein de la grande famille des Nivada Antarctic, cette référence apparaît comme le Graal. Bien que rarissime, elle s’offre aussi la coquetterie de disposer de deux versions de fond de boîte. Notre ami John @j.bjr, a effectué quelques recherches complémentaires qui mettent en évidence, en effet, un fond bombé (ci-dessous à gauche) et un fond plat (ci-dessous à droite).

Notre exploration de la Toile a également fait apparaître deux exemplaires apparentés : une Croton Nivada Grenchen Sea Diver logeant le cadran et l’aiguillage de la Super-Antarctic dans une carrure chromée (avec en prime une version à cadran blanc) et une Super-Antarctic au cadran tropicalisé qui, pour sa part, a l’air d’un remboîtage.

Réincarnation

Dans son livre, Aashdin K. Billimoria raconte comment Nivada a ranimé la flamme des amateurs pour ce modèle : « Lorsqu’un fan posta une Super Antarctic sur son compte Instagram, Guillaume [Laidet] partagea la publication sous forme de story sur le compte officiel de Nivada Grenchen et les fans devinrent fous. Les demandes commencèrent à pleuvoir pour réclamer la réédition de ce modèle. Nivada décida rapidement de donner suite et c’est ainsi que la Super-Antarctic fut lancée. »

La version moderne, inspirée du modèle original, n’est cependant pas une réédition à proprement parler ; je parlerais plutôt de réincarnation. Si le cadran et l’aiguillage reprennent fidèlement le design de l’époque, Nivada a choisi, par souci d’économie, de réemployer le boîtier conçu pour la nouvelle gamme Antarctic, lui-même inspiré, avec ses cornes aplaties, de la première génération de Nivada Antarctic. Le modèle, qui connaît un réel succès, forme une gamme déjà très étendue.

Au-delà de l’intérêt historique que présente déjà la Nivada Antarctic d’origine, l’Aquamatic Super-Antarctic et sa forte personnalité ne sont plus un « trésor enfoui » sous la glace. Cette fois, ce ne sont pas des explorateurs audacieux qui l’ont mis au jour, ce sont des entrepreneurs passionnés et efficaces, — aiguillés par des collectionneurs avisés, — qui ont permis cette montre très confidentielle de trouver le chemin d’une notoriété qu’elle mérite amplement.


Références
  • Nivada Grenchen. [en] Page officielle de promotion du livre sur les Nivada Antarctic réalisé par Aashdin K. Billimoria.
  • WornAndWound. [en] Belle revue de la Croton Nivada Grenchen Antarctic.
  • Watchuseek. [en] Fil de discussion sur les modèles Nivada Aquamatic.
  • Crédits : webdeals4less / eBay,

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